Rencontre avec Yves Gourinat, élu membre titulaire à l’Académie de l’Air et de l’Espace

Passionné de musique depuis sa plus tendre enfance, Yves Gourinat ne se prédestinait pas, a priori, à une carrière dans les sciences.

C’est à l’âge de 7 ans qu’il se découvre une passion pour l’aéronautique : “Quand j’ai vu l’image du Concorde, je me suis dit, c’est ça que je veux faire”. Son amour pour la physique est à l’époque “complètement indissociable de la musique”, et après son cycle au conservatoire, il continue de mener les deux de front jusqu’à ses 19 ans.

“Un vrai passionné” : c’est de cette manière qu’il se définit. Après avoir hésité entre la musique et la physique, c’est finalement la physique qui l’a emporté professionnellement.

Cet “électron libre”, issu du conservatoire et de la fac, passe alors le concours de l’ENSI (aujourd’hui Concours Commun Polytechniques) et intègre l’ENSMA dont il sort diplômé en 1984, Major de la filière Matériaux.

Une carrière en trois vocations

Une vocation pour l’enseignement d’abord. Il la doit en particulier à Didier Bellet, professeur de mécanique à Supaéro, “une personnalité extraordinaire”, qui le prend sous son aile comme adjoint pendant un an dans le cadre de son service national.

C’est au cours de cette période qu’une première opportunité se présente, l’année de ses 25 ans : “Il me téléphone un dimanche pour me dire, j’ai la grippe, est-ce que tu peux faire mon amphi à ma place demain ?”

Un premier cours magistral est donné et la machine est lancée !

“Je trouve beaucoup de joie à donner des cours en amphi parce que pour moi, c’est de l’improvisation théâtrale. J’arrive en cours magistral sans aucune note et c’est ça qui fascine les étudiants ! Mon accessoire principal, c’est une paire de lunettes. L’impro a une grande place, c’est l’héritage du Conservatoire, et de l’Orgue !".

Après l’obtention de son diplôme d’ingénieur ENSMA et de sa thèse de doctorat à SUPAERO, il intègre Airbus en 1990 (ex Aérospatial Division Avions) et y restera pendant 4 ans en tant qu’Ingénieur Structures Composites sur l’A340.

Un virage spatial

En 1994, il s’envole pour la Russie durant 6 semaines pour un stage de formation SOYOUZ-MIR à la Cité des Étoiles (un rêve d’enfant).

Il reprend en parallèle le chemin de l’école et s’engage en tant que professeur associé à l’ENSICA pour aider à la création d’une filière Espace aux côtés de Pierre Sintes, pour qui il effectuait déjà des missions de vacation : il travaillera pendant 10 ans avec lui sur la dynamique des lanceurs et la sécurité des vols habités.

“Je n’en serais pas là aujourd’hui s’il ne m’avait pas embauché. Je lui dois ma vocation spatiale.”

À l’ISAE-SUPAERO, “raconter la science”

C’est finalement en 2003 qu’il reprend la route de SUPAERO pour remplacer Serge Larose – avec qui il avait instauré une “vieille tradition” en le remplaçant en amphi dès que l’occasion se présentait – en tant que professeur associé.

Mais aussi pour suivre le conseil de son premier mentor, Didier Bellet (“Il faut que tu fasses de la recherche”), en devenant directeur de recherche, après le passage de son HDR - Habilitation à Diriger des Recherches en 2007.

“La recherche scientifique, c’est une transgression permanente : il faut aller là où les autres ne vont pas”.

Depuis 2008, Yves Gourinat est responsable du Mastère Spécialisé® « Aeronautical And Space Structures ». Il est également professeur associé en Mécanique des Structures, au sein du département Mécanique des Structures et Matériaux, donne des cours de biophysique à l’Université Paul-Sabatier et intervient aussi à l’Université du Texas à Arligton.

En 2011, l’International Astronautical Federation lui décerne la Malina Astronautics Medal, médaille mondiale attribuée chaque année à une seule personne, pour reconnaître l’engagement scientifique et pédagogique au service de l’Espace.

Le physicien se consacre aujourd’hui pleinement à sa vocation pour l’aéronautique, à travers ses cours et sa recherche sur ses domaines d’application : les réservoirs cryogéniques, les cellules vivantes et la thermodynamique des coques. L’enseignement, fil conducteur de son parcours professionnel, reste au cœur de son engagement puisqu’il encadre actuellement quatre doctorants… portant à 24 le nombre de thésards dirigés tout au long de sa carrière !

La reconnaissance d’une brillante carrière

Invité à toutes les séances de l’Académie depuis 2015, c’est en 2019 qu’Yves Gourinat est élu membre correspondant par l’Académie de l’Air et de l’Espace. Il y intègre divers groupes de travail sur la certification avion pour faire le lien entre l’Académie et les activités aérospatiales nationales et internationales de l’école.

Cinq ans plus tard, ce membre émérite, déjà actif dans plusieurs sociétés savantes dont la 3AF, est nommé titulaire, et assume avec plaisir de prendre “plus de responsabilités et de devoirs pour honorer l’Institut et en faire rejaillir son prestige”.

Il sera officiellement introduit le 6 décembre 2024 aux côtés de Stéphanie Lizy-Destrez, récemment élue membre correspondante, à la salle des Illustres du Capitole de Toulouse !